L'Orchidée de Maman

Ellen, L'orchidée de Maman

Mais quelle expression à la con !
Manifestement, celui qui nous a pondu ça n’avait encore jamais perdu qui que ce soit de cher. Genre, l’individu a un moyen d’action sur la cicatrisation. «Allez, aujourd’hui, j’arrête de procrastiner mon deuil, et je le fais sérieusement. Ça tombe bien, j’ai un trou entre midi et deux.».
Plus idiot encore, « avoir fait son deuil ». Genre, le processus est définitif. Comme si après quelques mois, le chagrin n’allait pas se repointer sournoisement et s’installer douillettement comme un boule dans la cage thoracique...

Mais tout ça, on ne te le dit pas. Tu n’es pas préparé dès l’enfance avec une expression qui signifierait « Tu vas bien en chier des ronds de chapeau et pile quand tu auras l’illusion que la pilule est digérée, ça reviendra te gifler en pleine face ». Les allemands ont forcément un mot pour ça.
Non, non, tu prends vraiment conscience du truc quand il te tombe et retombe sur la gueule.

En fait, le deuil est un tricot, un pull magique qui se tricote tout seul sur toi, maille après maille, jour après jour ; un chandail qui t’apporte un peu de cette chaleur réconfortante.
Et puis, au détour d’un chemin, un souvenir, une odeur viennent détricoter quelques rangs du pull et le froid vient te mordre à nouveau de plus belle.
J’imagine qu’avec le temps, les années, on perd moins de mailles à chaque fois.
J’espère...